Update RH et mobilité internationale

Retrouvez les nouveautés juridiques et fiscales en matière de ressources humaines, de mobilité internationale, d’impôts, d’assurances sociales, de droit du travail, de payroll et d'immigration.

Impôts

La Russie abroge avec effet immédiat la convention de double imposition avec la Suisse

Le gouvernement russe a signé le 8 août 2023 un décret suspendant l'effet de nombreux articles de conventions de double imposition (CDI). Ladite suspension vise les « pays inamicaux » dont feraient partie plus de 50 pays, dont la Suisse, l'Union Européenne, les Etats-Unis, l'Australie, ainsi que d'autres pays sur le continent européen ou asiatique.

Poutine justifie cette mesure par de prétendues « violations des intérêts économiques et autres intérêts légitimes » de la Russie par les pays susmentionnés.

Lorsque le lieu de travail et le lieu de domicile d'une personne n'est pas dans le même pays, les conventions de double imposition permettent au contribuable concerné de ne pas être taxé simultanément dans plusieurs états sur le même revenu de l'activité lucrative, les intérêts et les dividendes qu’il pourrait percevoir.

Concrètement, l'abrogation de la CDI entre la Suisse et la Russie impliquerait, d'une part, que le risque d'être imposé dans ces deux Etats soit nettement plus grand qu'auparavant et, d'autre part, que l'incertitude soit d'autant plus grande pour les contribuables concernés.

Le Département fédéral des finances (DFF) s'est positionné sur la question et a indiqué que la décision de la Russie de suspendre des dispositions de la CDI n'avait pas été communiquée à la Suisse par voie diplomatique et que, par conséquent, cette dernière part du principe que la CDI entre la Suisse et la Russie reste pleinement applicable. 

Le nouvel accord sur les frontaliers entre la Suisse et l'Italie est applicable à partir du 1er janvier 2024

Les nouvelles dispositions de l'accord sur l'imposition des travailleurs frontaliers ainsi que le protocole modifiant la convention contre les doubles impositions entre la Suisse et l'Italie sont entrés en vigueur le 17 juillet 2023 et seront applicables dès le 1er janvier 2024.

La réglementation datant de 1974 est remplacée. Quant au nouvel accord, il permet de définir plus clairement comment l'imposition des frontaliers est effectuée et qui est considéré comme frontalier. 

Sont considérés comme « nouveaux » frontaliers les personnes qui sont entrées sur le marché du travail suisse en tant que salariés à compter du 17 juillet 2023 et qui y entreront dans le futur, résidant en Italie – à moins de 20 kilomètres de la frontière suisse – et retournant quotidiennement à leur domicile. L'accord s'applique également aux frontaliers résidant en Suisse et travaillant en Italie.

Pour les « nouveaux » frontaliers, 80% des impôts ordinaires à la source sont prélevés sur leur revenu en Suisse. Ils sont, en outre imposés de manière ordinaire en Italie, évitant ainsi une double imposition.

Une réglementation transitoire s'applique aux frontalières et frontaliers qui ont travaillé dans les cantons des Grisons, du Tessin ou du Valais entre le 31 décembre 2018 et le 17 juillet 2023. Ces derniers continueront à être imposés exclusivement en Suisse et cette dernière continuera de verser aux communes limitrophes italiennes, jusqu'à la fin de l'année fiscale 2033, une compensation financière équivalente à 40% de l'impôt à la source prélevé en Suisse, conformément à l'ancien accord de 1974. 

Il convient, en outre, de noter que le statut particulier de frontalier cesse de s'appliquer si les 45 jours de non-retour sont dépassés.

Pour les employeurs suisses occupant des frontaliers italiens, ces modifications impliquent de vérifier en temps utile quel employé jouit du statut de frontalier selon la nouvelle définition, mais également une augmentation du travail administratif et des coûts du fait des adaptations des logiciels de paie (pour plus d'informations, consultez la rubrique « Payroll » plus bas).

Assurances sociales 

Entrée en vigueur le 1er octobre 2023 de la convention de sécurité sociale entre le Royaume-Uni et la Suisse

Suite à la sortie du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord (le « Royaume Uni ») de l'UE à compter du 1er janvier 2021, les relations en matière de droit des assurances sociales entre la Suisse et le Royaume-Uni ne sont plus régies par l'accord sur la libre circulation des personnes.

La nouvelle convention de sécurité sociale, qui était déjà appliquée provisoirement depuis le 1er novembre 2021, a été conclue bilatéralement par les deux Etats afin de régler les relations en matière de sécurité sociale post Brexit.

Cet accord est entré définitivement en vigueur le 1er octobre 2023 après que les deux Etats l'aient ratifié. Il coordonne désormais la sécurité sociale entre la Suisse et le Royaume-Uni.

Il n'y a pas de changement au 1er octobre 2023. 

Entrée en vigueur le 1er octobre 2023 de la convention de sécurité sociale entre la Suisse et l'Albanie

Après l'entrée en vigueur en septembre 2021 de la convention de sécurité sociale entre la Bosnie-Herzégovine et la Suisse, cette dernière a signé, le 18 février 2022, une nouvelle convention de sécurité sociale avec un pays des Balkans, l'Albanie. La convention de sécurité sociale entre l'Albanie et la Suisse est entrée en vigueur le 1er octobre 2023 et régit la coordination de la sécurité sociale entre ces deux Etats. L'Albanie était le seul pays des Balkans avec lequel la Suisse n'avait pas encore conclu de convention de sécurité sociale.

Cet accord règle les relations entre les deux États en matière d'assurance-vieillesse, de survivants et d’invalidité et dispose d'un contenu similaire à celui des conventions de sécurité sociale conclues par la Suisse avec les autres pays des Balkans. 

La convention se fonde sur les standards généralement appliqués dans les règlementations internationales et garantit dans une large mesure l'égalité de traitement des assurés des deux Etats. Elle règle, en outre, le paiement des rentes ordinaires en cas de domicile à l'étranger ainsi que l'assujettissement des personnes exerçant une activité lucrative. Le principe du lieu d'exercice de l'activité lucrative s'applique également. Les échanges économiques entre les deux états sont favorisés en évitant, par le biais du détachement de personnel, le double assujettissement aux assurances sociales.

Les dispositions de la convention sont applicables aux ressortissants des Etats contractants – indépendamment de leur nationalité – et s'appliquent en partie aussi aux ressortissants d'Etats tiers, par exemple en ce qui concerne les règles d'assujettissement. Cette convention fournit, en outre, les bases pour une coopération en matière de lutte contre les abus.

A noter enfin que la convention ne prévoit pas le versement d'allocations familiales aux enfants résidant en Albanie.

Droit du travail

Nouvelle loi fédérale sur la protection des données depuis le 1er septembre 2023

La nouvelle loi fédérale sur la protection des données (« nLPD ») est entrée en vigueur le 1er septembre 2023 et ne prévoit aucun délai transitoire. Les entreprises doivent donc immédiatement mettre en œuvre les nouvelles exigences légales. 

Concrètement, quels sont les principaux changements ? 

1. Les données des personnes morales ne sont plus couvertes par la loi.

2. Renforcement de notions existantes

  • Les données sensibles incluent désormais les données génétiques et biométriques.
  • Le devoir d'information porte dorénavant sur toutes les données de la personne concernée et non pas uniquement ses données sensibles.

3. Nouveaux principes

  • Les données sont protégées dès leur conception (Privacy by design). L'obligation de protection naît ainsi avant même le début du traitement ou de la collecte des données.
  • Les données sont protégées par défaut (Privacy by default).
  • Le profilage - soit le traitement automatisé de données personnelles - est expressément prévu par la loi et réglementé.  

4. Nouvelles obligations

  • Analyse d'impacts obligatoire pour des traitements de données présentant un risque élevé pour la personnalité ou les droits fondamentaux des personnes concernées.
  • Tenue d'un registre des activités de traitement de données. Des exceptions ont cependant été mises en place pour certaines entreprises.
  • Annonce rapide auprès du Préposé fédéral à la protection des données en cas de violation de la sécurité des données.

A noter que certaines obligations spécifiques dépendent de la taille de l'entreprise ou de la nature des données traitées.

Finalement, relevons que les sanctions pénales ont été renforcées dans la nLPD, la peine maximale ayant été fixée à CHF 250'000. Les conséquences civiles ou de droit public liées à une violation de la nLPD doivent également être prises en compte. 

Il est donc essentiel que chaque entreprise procède à une analyse afin de déterminer les conséquences qu'a pour elle la nLPD et, le cas échéant, instaure les mesures nécessaires pour se mettre en conformité au plus vite (ex : élaboration de déclarations de protection des données, mise en place de consentements spécifiques notamment dans la collecte des données des candidats, revue des contrats de sous-traitance de données, analyse de la manière dont les données sont stockées notamment en cas de transfert à l'étranger, etc.). 

Payroll 

Le nouvel accord sur les frontaliers entre la Suisse et l'Italie - Nouveaux codes tarifaires de l'impôt à la source à partir du 1er janvier 2024

Pour la comptabilité salariale, le nouvel accord sur les frontaliers entre la Suisse et l'Italie implique une adaptation des codes de tarif de l'impôt à la source, qui devront être correctement appliqués à partir du 1er janvier 2024. Pour les « nouveaux » frontaliers (les personnes qui seront désormais considérées comme des frontaliers à partir du 17 juillet 2023), la Suisse conservera désormais 80% de l'impôt à la source régulier sur le revenu. Pour ces « nouveaux » frontaliers, de nouveaux codes de tarif d'impôt à la source (R, S, T, U et V) sont introduits en Suisse dans les cantons des Grisons, du Tessin et du Valais.

Comme les nouveaux frontaliers sont en outre imposés de manière ordinaire en Italie, tout en éliminant une double imposition, les revenus sont déclarés chaque année à l'Italie par le biais d'un échange de données électroniques.

Pour les « anciens » frontaliers (qui étaient déjà frontaliers entre le 31 décembre 2017 et le 17 juillet 2023), qui étaient jusqu'à présent imposés avec le code tarifaire F et pour lesquels les dispositions transitoires du nouvel accord sont applicables, les tarifs ordinaires de l'impôt à la source (A, B, C, H et G) seront désormais appliqués. Le code tarifaire F n'existera plus.

Pour les employeurs suisses qui ont des frontaliers italiens, nous recommandons de suivre les étapes suivantes :

  • Examen de la population des travailleurs frontaliers :
    • Quelles personnes sont considérées comme « anciens » frontaliersL
      • Nouveau à partir du 17 juillet 2023 en tant que salarié sur le marché suisse
      • Le domicile reste en Italie et se trouve à moins de 20 kilomètres de la frontière suisse
      • Retour quotidien au domicile
      • Attribution des codes tarifaires pour les « anciens » et les « nouveaux » frontaliers
      • Logiciel de comptabilité salariale : adaptation des nouveaux codes tarifaires de l'impôt à la source pour les « anciens » et « nouveaux » frontaliers
      • Suivi des jours de non-retour : mise en place d'un système de suivi des jours de non-retour afin de pouvoir confirmer le statut de frontalier aux autorités.
      • Déclaration électronique obligatoire : les revenus doivent être déclarés aux autorités fiscales au plus tard le 20 mars de l'année suivante pour l'année fiscale concernée.

Immigration

ETIAS ne verra pas le jour avant 2025 au plus tôt

  • ETIAS (European Travel Information and Authorisation System) est un nouveau système de voyage et d'autorisation de voyage - similaire à l'ESTA des Etats-Unis - qui aurait dû être introduit dans toute l'Europe en 2024 après quelques reports. Selon les informations fournies par le Secrétariat d'Etat aux migrations, l'introduction d'ETIAS sera probablement retardée jusqu'en mai 2025.
  • Dès l'introduction d'ETIAS, une telle autorisation de voyage sera nécessaire pour l'entrée dans l'espace Schengen des ressortissants de pays tiers provenant de pays exemptés de visa. Grâce à cet examen des risques encourus par les voyageurs, ETIAS doit permettre de prévenir l'immigration illégale et d'accroître la sécurité intérieure. 
  • Contrairement au visa Schengen, l'ETIAS n'est pas un visa et pourra être demandé en ligne via un système central de l'UE avec peu d'efforts.
  • L'autorisation de voyage ETIAS est valable pour des séjours de courte durée, jusqu'à 90 jours, et ne remplace pas un visa de travail ou un visa d'étudiant. Si une personne d'un pays exempté de visa ne dispose pas d'une autorisation de voyage ETIAS valable, l'entrée dans l'espace Schengen lui sera refusée.
  • Au niveau européen, la Suisse participe activement à différents groupes de travail et d'experts de la Commission européenne et de l'Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes Frontex et mettra en œuvre l'introduction d'ETIAS conformément au calendrier de l'UE.

Article rédigé par Gordana Muggler, Julie Eggenschwiler et Nathalie Schmid-Bessard